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le blog de Primatin
le blog de Primatin
15 janvier 2009

Utopisme

Le trop facile est inhumain

[suite des quatre messages précédents]

  Primatin et Primatine nous montrent ce que cachait la légende édénique : sans opposition, aucun être humain ne grandit ; sans conflit, aucune société ne progresse.
  Primatin tombe d’un arbre, se casse la jambe et souffre beaucoup. Il reste boiteux, mais il ne se plaint pas. Il ne reproche son malheur ni à Dieu, ni au diable, ni au péché de ses ancêtres. Son infirmité renforce la solidarité familiale. Que ses fils montent aux arbres à sa place !
  Depuis son enfance, Primatin ignorait la vie facile et protégée. Il ne gardait aucun souvenir de sa mère : elle mourut après l’avoir allaité. À la fin de sa septième année, il chassait avec son père quand un tigre énorme les surprit. Papa n’eut que le temps de le hisser sur la branche d’un arbre. Puis, dégainant sa hache de pierre, il affronta le monstre.
  Le combat fut inégal. Quand l’image du corps déchiqueté lui revenait en mémoire, Primatin ne songeait qu’à se venger. Tendu en avant par la rage de vaincre, il fabriqua un piège à tigres. Ce fut sa première invention.

  Primatine ? Une lutteuse, elle aussi ! Lasse d’entretenir le foyer jour et nuit, elle fit tourner une baguette de bois dur dans un bol de bois tendre. Procédant à de nombreux essais, avec différentes essences d’arbre, elle finit par obtenir de la braise, et elle en fit jaillir une flamme. Le Sorcier de la tribu n’apprécia pas cette découverte, qui concurrençait son pouvoir. Il exclut la dangereuse innovatrice. Primatin partit avec elle.

*

  Comme cadeau de bienvenue, les impulsés offrirent aux expulsés une peau de tigre. C’était pour garnir la hutte que Primatin et Primatine aidaient Adam et Ève à construire. Tout en s’activant, les impulsés racontaient leurs luttes dans la jungle.
  Adam intervint :
— En Éden, les tigres mangeaient de l’herbe et nous les caressions comme des moutons.
  Ève ajouta :
— Pas de feu ! Les cailles nous tombaient toutes rôties du ciel.  Primatin se curait les dents avec un poil arraché à la moustache du félin occis (une pratique qui reste en vigueur dans la jungle de Malaisie). Il retira le poil et grommela dans sa barbe :
— Ni tigre mangeur d’homme, ni feu dévoreur de hutte ! Comment devenir humain dans votre paradis ?
— « MAHA-NA, M’BÉLÉ ! », reprit sentencieusement Primatine.
  Littéralement : humain pas, le trop facile (en primatinien, bélé = facile, car c’est ce que fait le mouton ; m’bélé = trop facile). Soit, en bon français, le trop facile est inhumain.

*

  Face à l’idéalisme que, malgré son échec, la belle Ève essayait encore de promouvoir, la robuste Primatine initia une philosophie du réel qui aida l’humanité à vaincre les multiples obstacles de son parcours terrestre. Quand vécut notre mamie à tous ? Je situe mes héros au Paléolithique supérieur, après l’invention de l’outil (qui permit notre survie), mais avant l’instauration de la morale (qui nous causa bien du souci).
  Remonter aux bourses d’un primate demanderait des millions d’années. À cette échelle et malgré leur nom, distants de mille générations environ, Primatin et Primatine sont nos contemporains. Ils se montrent d’authentiques homo sapiens, aussi intelligents que nous mais disposant d’une base de connaissances moins étendue. Distinguons à ce propos la faculté de comprendre et la masse des données sur lesquelles s’exerce cette faculté. Une encyclopédie vivante ne sait pas toujours analyser et interpréter tout ce qu’elle a enregistré dans le disque dur de son cerveau. À l’inverse, des gens qui n’ont pas étudié se montrent adroits et intelligents : c’était le cas de Primatin et de Primatine. On a retrouvé la statuette à tête de lionne qu’eux ou leurs enfants fabriquèrent, en ivoire de mammouth. Cet objet d’art aurignacien date de 30 000 ans avant notre ère…

[le 30 janvier : recherche des causes]


Notre vie est dure, mais pas autant que celle des premiers humains, qui réussirent cependant à nous transmettre la vie. A leur exemple, faisons face aux obstacles en refusant l'évasion facile proposée par les utopismes politiques ou religieux. Deux pages à lire en cliquant sur le lien ci-dessous:

Utopisme béat ou la foi du lapin



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