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le blog de Primatin
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15 mai 2009

Quatre fonctions

La religion et ses quatre fonctions

  À travers les multiples variantes qu’entraînèrent des environnements divers, la religion joua dans l’histoire humaine un quadruple rôle. Je résume ce qui remplirait plusieurs volumes :

Un rôle explicatif (les dieux bouche-trous).
  En vertu de sa fonction explicative, la religion chercha la cause des phénomènes naturels. Avant le développement des sciences expérimentales, la religion attribuait à une intervention divine les phénomènes incompréhensibles. En lien avec son cadre de vie, chaque tribu développa les mythes qui lui convenaient. En voici des exemples :
— Jupiter brandissait la foudre, Neptune agitait les océans, Vénus et Cupidon déclenchaient les sentiments amoureux.
— Des anges tournaient la manivelle de la voûte céleste, ou tiraient vers l’Ouest le char resplendissant du soleil.
— Une faute du premier couple humain entraînait déchéance et chaos.
  Étape primitive du savoir, le mythe apprivoise l’inconnaissable. Dans certains cas, il sert la discipline collective. Ainsi, dramatisant la révolte d’Adam et Ève, le mythe de la Chute exalte la vertu d’obéissance.

Un rôle normatif (les dieux gendarmes).
  La fonction normative consistait à définir le permis et le défendu. Des normes sévères assuraient la cohésion et le développement d’un groupe humain, dans des conditions particulières de survie.
  La religion édictait des lois pour contrôler l’hygiène, éloigner les épidémies. Elle exaltait la fécondité des femmes, afin que le groupe subsiste et grandisse, malgré la faible espérance de vie de chaque individu.
  La religion divinisait les Chefs, pharaons, rois ou empereurs. Pour leurs sujets, elle codifiait prescriptions et proscriptions, récompenses et punitions. Le but recherché étant la force et la pérennité tribales, l’intérêt collectif passait avant tout souci individuel. Vis à vis d’un «supérieur» choisi par Dieu, l’inférieur, le subordonné avait beaucoup de devoirs et peu de droits.

Un rôle festif (les dieux cérémoniaux).
  La fonction festive entretient un réflexe d’appartenance au groupe. Jadis, elle rythmait le cycle des saisons et la succession des travaux agraires. Elle célèbre encore les étapes d’une vie humaine : accueil à la naissance, entrée dans l’adolescence, fondation d’une famille, départ vers l’au-delà.
  Avec Edith Piaf, les Compagnons de la Chanson chantaient les trois cloches. Elles sonnaient le baptême, le mariage, les funérailles de Jean-François Nicot. Pratiquants ou non, nous sommes choqués de ne pas trouver un curé pour desservir le village au fond de la vallée, pour baptiser un enfant dans la vieille église, pour fêter une noce, pour bénir une tombe.

Un rôle mystique (le Dieu aimant).
  La fonction mystique est personnelle. Elle ne définit pas les normes d’une vie communautaire. Elle ne s’intéresse pas à la survie de la tribu; elle vise la SUR/VIE de l’individu. Elle ne structure pas un groupe; elle structure une personne. La mystique entraîne vers des sommets d’humanité que l’obligation d’un devoir social ne permet pas d’atteindre. Elle suscite une vertu plus profonde que le civisme exigé des patriotes religieux.
  Transcendant le butoir de la mort, la mystique donne sens à la vie. Par sa foi dans un Dieu qui invite à la rencontre personnelle, le croyant atteint une autonomie que la religion lui refuse. Il n’est pas seulement le maillon d’une chaîne vitale, le rouage bien huilé de la pérennité tribale. Il représente plus qu’une partie dont la valeur a pour limite son apport au tout.
  La mystique devrait être l’ordinaire du croyant, du chrétien en particulier. Je ne parle pas ici de phénomènes surprenants, échappant aux lois physiques. Je parle d’une mystique simple, modeste, accessible à tous de par l’incarnation de Dieu en Jésus-Christ. Avec cette incarnation, le Transcendant se met au niveau de l’immanent; il se rend proche de chaque être humain; il se propose comme son compagnon. N’est-il pas mystique de vivre tous les jours avec l’homme-Dieu ?
  Pour qu’elle soit ancrée dans l’expérience terrestre, j’ai voulu que ma foi s’harmonise avec les connaissances sur lui-même que l’homme s’est acquises. Chrétien, j’ai cherché à assimiler chrétiennement l’évolution. Évacuant mythes et croyances comme autant de vieux meubles, mon christianisme s’est recentré sur le Christ en même temps que je me suis reconnu descendant de primates plutôt que clone divin.
  Introduire une perspective mystique dans La saga des primates promus, c’est pour moi une démarche cohérente, mûrie dans une longue quête expérimentale. Sans vouloir l’imposer, j’ose donc faire part d’une conviction: un primate auto-promu à l’humanité peut vivre une promotion plus grande. C’est là qu’intervient la transcendance divine : une promotion à la SUR/VIE ne peut être que le fruit d’un appel mystique ressenti ou non, accepté ou non ; le fruit d’un libre partenariat entre l’être humain et l’être divin qui l’aimante.
  Je ne pense pas que la mystique chrétienne soit la seule mystique menant à la SUR/VIE. Elle est le modèle dont je parle, parce que j’en vis. Elle établit une relation fusionnelle entre deux personnes concrètes: un terrien; un Dieu qui s’est incarné sur terre. Craignant qu’elle court-circuite leur sainte autorité, des chefs religieux lui font barrage.
  Et la fonction festive ? Le religieux festif joue sur deux tableaux. Tantôt, il flatte un sentiment d’appartenance communautaire. Tantôt, il élève le primate promu au-dessus de sa condition, jusqu’à l’extase peut-être…

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